Auteur: Mathieu Gaborit
Éditions Le Pré aux Clercs
Publié le 8 septembre 2011
Site Web: Éditions Le Pré aux Clercs
Genre: Fantasy
Pages: 304 Prix: 19 €
Résumé de l'éditeur:
Lilas, une naine flamboyante, a choisi, depuis la disparition de Frêne, son époux, de prendre sa retraite de Chef de la garde du palais de la Haute Fée pour ouvrir une auberge au bord de la mer, à l'endroit même ou Frêne s'est "ancré" pour l'éternité. Entourée de quelques amis et de son amant Errence, un elfe, elle mène une existence un peu trop paisible à son goût.
Alors qu'elle s'interroge avec angoisse sur son devenir, son fils Saule, pourchassé par un groupe de miliciens au service de la Haute Fée, fait irruption dans l'auberge. Il serre dans ses bras une adolescente de 16 ans, Brune, qui est à l'agonie.
Après quelques heures d'hésitation, et bien que pressentant l'immense danger qui émane de façon indicible de la personnalité de Brune, Lilas décide de les protéger envers et contre tous.
Mon avis:
Ce n'est pas la première fois que je lis un ouvrage de Mathieu Gaborit. Je suis tombée sous le charme de sa plume, notamment grâce à ses collaborations avec l'illustratrice enchanteresse Amandine Labarre: Arcanes Féeriques, Faery City...
Étant également une habituée des publications des Éditions Le Pré aux Clercs, ainsi que de leur grande qualité; et au vu de la superbe illustration de couverture de Chronique du Soupir par Didier Graffet, je m'attendais ici à une œuvre poétique et ensorcelante.
Chronique du Soupir est une fable philosophique qui traite du besoin de liberté que ressent tout être vivant, de celui de prendre en main son destin pour ceux qui se sentent opprimés, de l'amour aussi et de ce qu'il est capable de nous faire faire, et enfin de la naissance des Hommes.
Dans cet univers tissé comme un Matrix féerique, deux réalités se confondent. L'une est bien réelle et palpable, mais elle dépend entièrement de la deuxième qui est régit par les champs féeriques: magie dominée par les fées et basée sur le souffle, qui relit toutes choses et se fonde sur l'esprit, la pensée.
Depuis la trahison des êtres vivants envers la Fée Primordiale (sorte de déesse qui a créé ce monde), ceux-ci sont contraints à vivre avec une fée dans le cœur et sont donc totalement dépendants de cette dernière ainsi que des champs féeriques.
C'est avec la révolte d'une naine, Lilas, envers ce système, suite à l'arrivée improbable de son fils, Saule, que commence ce roman.
Le style de Mathieu Gaborit est toujours aussi envoutant, et le message qu'on veut nous transmettre ici l'est tout autant, mais la manière dont il est traité m'a semblé bancale. Le fond est bon, mais la forme employée le dessert totalement.
En effet, la fantasy ici semble n'être qu'un prétexte pour enrober la morale philosophique finale, et tout paraît reposer là-dessus.
Avec un univers aussi complexe (le système des champs féeriques) et le sujet exploité, il me semble que cela aurait mérité d'avantage que moins de 300 pages pour être développé.
Personnellement, je n'aurais pas choisi le format du roman en un seul tome pour cette histoire, qui me laisse un arrière-goût d'inachevé: très peu de points sont approfondis, et cela laisse peu de place pour s'attacher aux personnages, d'autant plus que certains disparaissent très vite sans raison évidente (j'ai été très frustrée d'ailleurs par la disparation de l'un d'eux), et certaines interrogations demeurent.
Le fait que tout semble rester en surface donne également l'impression étrange que l'univers de Chronique du Soupir est trop personnel, trop propre à l'auteur, sans laisser la possibilité au lecteur de pouvoir l'aborder. Un univers que j'ai trouvé trop hermétique à mon goût.
Cela est d'autant plus déconcertant car, comme je l'ai dit, les bases sur lesquelles se fondent cet univers sont déjà assez complexes en soi. Il en résulte une trame trop abstraite.
Par ailleurs, je ne suis pas du genre à jouer les effarouchées mais certaines descriptions et certains passages m'ont paru trop crûs. Cela ne m'aurait pas gêné s'ils avaient apportés quelque chose au roman, mais ils arrivent comme un cheveu sur la soupe, et sont un peu trop brutes de décoffrage, comme s'ils n'avaient aucun rapport avec l'histoire.
Je n'ai pas non plus apprécié l'aspect trop religieux qui finit par transpirer au travers des lignes: la Fée Primordiale qui décide d'absoudre ses "enfants" de leurs péchés suite au sacrifice de l'un d'entre eux.
En définitif, Chronique du Soupir, avec le style enchanteur de son auteur et le thème abordé, aurait pu être un magnifique roman si son univers et ses personnages avaient été d'avantage exploités, et ne laissait pas le lecteur sur sa faim, avec un arrière goût étrange d'inachevé.
Le souffle de cette histoire n'a malheureusement pas réussi à atteindre la fée qui se tapit dans mon cœur, et je ne suis pas parvenue à en percer les rouages.
Mais puisque tout semble ici être question de sensibilité personnelle, le charme de cette histoire pourra très bien opérer sur d'autres, à n'en point douter.